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19 novembre 2008 3 19 /11 /novembre /2008 17:30
Non, ce billet ne parle pas de l’histoire de Banania, qui après tout n’a que peu à voir avec le thème de ce blog, à savoir l’Histoire antique (ou alors on m’a menti).

J’imagine, par conséquent, que vous vous demandez bien pourquoi je parle de Banania. Non, je n’ai pas perdu la raison. En fait, il se trouve qu’au dos d’un paquet en ma possession se trouve une petite bande dessinée présentant le jeune Banania en différents personnages de la Rome Antique (ah, on commence à se rapprocher du sujet, déjà). Et c’est ainsi qu’on trouve cette vignette, dans laquelle le personnage joue un sénateur romain :



On y voit que la suggestion faite (« créer un corps de pompiers qui interviendront en cas d’incendie ») provoque les railleries de l’assemblée.

Alors, ridicule, l’idée d’avoir des pompiers dans la Rome Antique ?

Absolument pas, vous vous en doutez. Les villes antiques, surtout quand elles sont aussi imposantes que Rome, sont particulièrement sensibles aux incendies. Les dégâts subis par la ville sous les règnes de Néron ou de Commode en témoignent. Et au delà de ces épisodes particulièrement spectaculaires, les incendies sont très fréquents : prenons, arbitrairement, la durée du règne d’Auguste, de 27 av. J.-C. à 14 ap. J.-C. On a des incendies connus à Rome en 25, 23, 16, 14, 12, 7 av. J.-C. ainsi qu’en 3 et 6 ap. J.-C (1). Soit huit incendies ayant causé suffisamment de dommages pour que nous en ayons eu écho.

 De ce fait, il serait absolument inconscient de la part du pouvoir impérial (ne connaissant les faits que pour cette période, je ne parlerai pas de République) de laisser Rome démunie face à ce danger.

Auguste crée donc, en 6 ap. J.-C., sept cohortes de vigiles, de mille hommes chacune. Ces hommes servent de corps de pompier permanent dans la ville de Rome. Ils assurent également la police de nuit.
Auguste créant également le découpage administratif de Rome en quatorze régions, chaque cohorte de vigile est en charge de deux d’entre elles.

Ces troupes, équipées du matériel approprié pour lutter contre les incendies, sont stationnées dans différents postes d’urgence un peu partout dans la cité, permettant une intervention rapide en cas de début d’incendie.
Sous le règne de l’empereur Claude (41-54 ap. J.-C.), deux nouvelles cohortes sont créées : l’une est installée dans le port de Pouzzoles, l’autre dans le port d’Ostie, tous deux lieux de transit essentiels au ravitaillement de Rome (le ravitaillement était une question particulièrement sensible pour une ville aussi peuplée que Rome, ce qui explique les précautions prises par les empereurs pour éviter qu’il ne soit compromis).

7000 hommes au total chargés en premier lieu de lutter contre les incendies à Rome, cela montre bien que l’idée d’un corps de pompiers était loin d’être ridicule, et ce malgré le fait que ces vigiles soient également chargés d’assurer la police de nuit. En effet, les cohortes urbaines, qui assurent la police le jour, ne comprennent lors de leur création par Auguste que 1500 hommes en tout (ce nombre varie par la suite).

Ces cohortes de vigiles se révèleront toutefois incapables d’empêcher notamment le grand incendie de Rome de 64 ap. J.-C., incapacité tenant aux matériaux de constructions utilisés dans les cités antiques, souvent inflammables, et à l’entassement des bâtiments dans cette cité d’un million d’habitants, favorisant la propagation du feu.
___

Source : P. Cordier, Rome, Ville et capitale, de César à la fin des Antonins, Paris, Bréal, 2001.

Les informations sur les vigiles sont principalement tirées de l’ouvrage du spécialiste français de l’armée romaine, Y. Le Bohec, l’armée romaine, Paris, Picard, 1998 (deuxième édition)

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commentaires

R
Choix judicieux, évidemment, que celui de l'ouvrage de Yann le Bohec. Historien incontournable concernant la Rome antique (J'en avais déjà d'ailleurs fait allusion dans mon commentaire à votre article du 28 octobre).<br /> <br /> Intéressante mise au point sur un sujet aussi crucial, pour Rome, que les incendies et ceux censés les circonscrire. Et votre dernier paragraphe, aussi éclairant que les flammes s'emparant de Rome elle-même, prouve - s'il était encore besoin - qu'il était illusoire de penser éviter ce type de danger et d'essayer de l'endiguer : les étages à encorbellements en bois que l'on élevait sur les immeubles déjà existant ne pouvaient matériellement pas permettre de sauver la ville de ce type de fléau.<br /> <br /> Et comme souvent, des propriétaires véreux préférèrent l'argent des locations à la seule pensée du danger que de telles constructions allaient provoquer ...<br /> <br /> En est-il autrement, à l'heure actuelle, dans certains pays du sud-est asiatique ?
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